Voici une photo de moi dans la vingtaine. On pourrait croire que la jeune femme que l'on voit ici était heureuse, épanouie, fonceuse et sûre d'elle. Et pourtant...
J'avais peut-être gagné quelques centimètres en hauteur, mais, intérieurement, j'étais toujours aussi petite et insécure.
Le pire, c'est qu'enfant, j'étais persuadée que le jour où je deviendrais "adulte", j'allais enfin être débarrassée de cette timidité maladive qui me pourrissait tant la vie. Je pensais que le sentiment de honte que j'éprouvais alors en permanence - ce manque d'estime et d'habiletés sociales - allait s'améliorer du tout au tout et que, soudainement, j'allais devenir "quelqu'un de normal".
En réalité, j'avais la conviction (et l'espoir) que la vie avait, en réserve, de beaux projets pour moi. Il ne pouvait en être autrement, considérant le genre d'enfance que j'avais vécu. Et pourtant...
LE BESOIN D'EXISTER
À l'époque, je me rappelle que je me complaisais beaucoup à voir et à focaliser sur tout ce qui n'allait pas dans ma vie. Principalement parce que j'étais restée amère par rapport à mon passé.
Malgré tout, je peux dire que j'ai souvent éprouvé une très grande fierté chaque fois où j'ai pris le taureau par les cornes, et ce, en dépit de mon très grand manque de confiance et de cette fichue timidité qui ne me quittait pas.
C'est ainsi que je suis montée sur scène à plusieurs reprises, m'exposant ainsi volontairement à la vue et au jugement du public. Mes premières expériences ont été en tant que mannequin pour des défilés de coiffure et de mode. Puis, un jour, j'ai décidé que je voulais devenir une chanteuse.
Ma plus grande douleur au cours de cette période où j'essayais de "trouver ma place" était cette urgence de vivre que j'éprouvais en permanence. Comme si je devais rattraper / racheter toutes ces années où j'avais été malheureuse comme les pierres, où j'avais été invisible...
Je sentais ma poitrine se comprimer à chaque fois que je réalisais que je n'étais pas en train de faire / être / vivre ce que j'étais sensée faire / être / vivre. J'avais l'impression de suffoquer parce que j'avais l'impression de carrément passer à côté de quelque chose d'important : le bonheur d'être enfin celle que je sentais, que je savais être.
Tout ce que je voulais, moi, c'était EXISTER à la puissance au carré! J'avais donc un incroyable besoin de m'exprimer : d'être vue et entendue.
C'est ainsi que mon désir de "devenir quelqu'un" par le biais de la chanson est devenu mon obsession. Il me fallait réussir à tout prix. Même si cela me demandait un courage et un dépassement incommensurable à chaque fois que je devais faire une apparition en public...
Toute cette pression, bien entendu, a fini par avoir raison de ma santé émotionnelle et c'est ainsi qu'au lendemain de mon lancement d'album, l'élastique a cassé.
L'année qui a suivi a été la plus noire de toute ma vie, mais, paradoxalement, la plus salvatrice.
J'ai été forcée de visiter les profondeurs de mon âme et c'est là que j'ai pu faire la rencontre de celle que les circonstances de la vie avaient emprisonnée, mais qui n'avait rien à voir avec cette enfant que tout effrayait.
En fait, je n'étais pas une victime, mais une combattante.
C'est ainsi que je suis passée de la personne qui ne dit jamais rien de peur de déplaire à autrui à la personne qui ne peut s'empêcher de dire ce qu'elle pense et, croyez-moi, après autant d'années à être invisible et à me tenir silencieuse, c'était incroyablement libérateur!
L'ÉPREUVE QUI NOUS RAMÈNE DANS LA BONNE DIRECTION
Je ne pense pas qu'il faille absolument passer par une "dépression" pour être libéré de toutes nos limitations, mais, dans mon cas, c'est tout de même cette épreuve qui a permis de scier les barreaux de cette prison que j'appelle "timidité".
C'est un peu comme si j'avais subi une réinitialisation de mon système. Depuis, j'ai arrêté de m'en faire par rapport à ce que les autres peuvent penser de moi et même, à la limite, de mon propre regard sur ma personne. Ce simple changement d'attitude y fait beaucoup pour aider à surmonter la timidité.
LE MEILLEUR CONSEIL
Durant toutes ces années où j'ai voulu "analyser ce qui n'allait pas" parce que je pensais que la vérité me libérerait, je ne réalisais pas que plus je restais coincée dans mon scénario de vie triste et désolant, moins j'avançais.
Car, oui, de demeurer dans l'énergie du "ô pauvre de moi" nous condamne à faire du surplace. Nous arrosons les mauvaises herbes que sont la honte, la rancune, la frustration, la culpabilité... au lieu de planter de nouvelles graines et de vibrer exclusivement dans le sens où nous voulons voir la vie nous porter.
Ce qui nous libère dans la vérité, c'est quand celle-ci va exactement dans le sens que nous voulons qu'elle aille. Quand nous finissons par entendre ce que nous espérions entendre... Autrement, la vérité peut aussi rajouter des barreaux à notre prison.
Alors, pourquoi ne pas bâtir notre vie à partir de nouveaux matériaux, en faisant fi de tout ce qui s'est passé avant aujourd'hui?
Peu importe ce que nous avons été (vécu) hier, ce qui compte, c'est ce que nous voulons être (vivre) demain.
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